Actes chapitre 19

29 Toute la ville fut dans la confusion. Ils se précipitèrent d'un commun accord au théâtre et entraînèrent avec eux les Macédoniens Gaïus et Aristarque, compagnons de voyage de Paul.
30 Paul voulait se présenter devant le peuple, mais les disciples l'en empêchèrent ;
31 même quelques-uns des Asiarques, qui étaient ses amis, lui envoyèrent (des messagers) pour l'exhorter à ne pas se rendre au théâtre.
32 Les uns criaient d'une manière, les autres d'une autre, car la confusion régnait dans l'assemblée, et la plupart ne savaient même pas pourquoi ils s'étaient réunis.

Une situation dangereuse s'était développée non seulement pour les chrétiens présents mais également pour les Éphésiens en raison de l'émeute que le pouvoir romain ne tolérerait pas.

Comme on connaît Paul, on ne s'étonne pas qu'il est prêt à intervenir mais quelques-uns de ses amis cherchèrent à l'en dissuader.
Par contre Gaïus et Aristarque, des compagnons de voyage de Paul, furent entraînés par la foule.
La situation était non seulement explosive en raison du fanatisme pour l'Artémis des Éphésiens, elle l'était également en raison de la confusion générale qui régnait, certains criant avec sans même savoir pourquoi !   

Peut-on discuter en argumentant raisonnablement dans une situation pareille ?

33 Alors on fit sortir de la foule Alexandre, que les Juifs poussaient en avant ; et Alexandre faisait signe de la main et voulait se défendre devant le peuple.
34 Mais quand ils reconnurent qu'il était Juif, tous crièrent d'une seule voix pendant près de deux heures : Grande est l'Artémis des Éphésiens !

La situation n'est pas nouvelle : bien souvent, lorsque Paul ou ses compagnons parlaient publiquement de la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ en Asie, en Grèce ou dans d'autres régions de l'empire romain, les Juifs de la dispersion qui s'y trouvaient se faisaient entendre à leur tour. Bien souvent, c'était pour dire aux païens parmi lesquels ils habitaient que les chrétiens d'origine juive venus parler de leur foi n'avaient rien de commun avec la synagogue et la communauté juive locale. Mais Alexandre était reconnu comme Juif par certains de la foule et la réaction fut prompte : la foule ne voulait écouter ni les prédicateurs chrétiens ni Alexandre que la communauté juive poussait en avant !

Le récit est intéressant sous divers aspects, il nous révèle notamment jusqu'où peut aller l'effet de la psychologue de masse !
Scander pendant près de deux heures "Grande est l'Artémis des Éphésiens ! Grande est l'Artémis des Éphésiens ! Grande est l'Artémis des Éphésiens ! ..." correspond déjà à un état de délire qui peut facilement conduire au lynchage de ceux qui pensent autrement que la masse.

19:35 Cependant le secrétaire calma la foule et dit : Éphésiens, quel est l'homme qui ne sait pas que la ville d'Éphèse est la gardienne du temple de la grande Artémis et de sa statue tombée du ciel ?
36 Puisque cela est incontestable, vous devez vous tenir calmes et ne rien faire avec précipitation.

La plupart des traducteurs rendent le mot grec γραμματευς grammateus par secrétaire [de la ville]. Le titre et la fonction de grammateus ou secrétaire de la ville est confirmé par des inscriptions trouvées à Éphèse. Il avait comme fonction de communiquer notamment avec le proconsul romain qui gouvernait la province entière. Le secrétaire de la ville contrôlait également l'assemblée des citoyens lorsque celle-ci était convoquée, etc. Cet homme était donc bien connu des Éphésiens qui respectaient son autorité. Il faisait bien son travail car il intervint de manière très habile pour calmer tout le monde puisqu'il rassura les croyants de "la grande Artémis des Éphésiens" qu'il est incontestable que sa statue était tombée du ciel. Tout le monde le sait ! Donc calmez-vous !

Avant d'intervenir, il s'était certainement informé sur la cause de cette émeute et tant que la foule ne faisait que scander "Grande est l'artémis des Éphésiens", il n'y avait pas de dégâts. Après avoir ainsi clamé la Grandeur de l'Artémis pendant environ 2 heures, une certaine fatigue vocale devait se faire sentir chez les manifestants. L'apparition du secrétaire de la ville les fit se taire instantanément, ce qui lui permit de parler à la foule.

19:37 Vous avez amené ici ces hommes qui n'ont pourtant pas pillé de temples et n'ont pas fait insulte à notre déesse..

Le sécrétaire de la ville constate les faits: les accusés
- ne sont ni des voleurs de temples : Il n'y avait donc rien à leur reprocher en actes
- ni des gens qui auraient insulté la déesse : donc , il n'y avait rien à leur reprocher non plus en paroles !

Le secrétaire de la ville conclut donc logiquement :
38 Si donc Démétrius et les artisans qui sont avec lui ont un grief contre quelqu'un, il y a (des jours) d'audience et des proconsuls ; qu'ils portent plainte !

Démétrius et les artisants étaient donc instruits sur la voie à suivre s'ils avaient un grief contre quelqu'un :
s'adresser à la cour de justice et, au cas où ils ne seraient pas d'accord avec le jugement, de faire appel en s'adressant au proconsul.
Donc : qu'ils portent plainte légalement !

39 Et si vous avez d'autres réclamations, cela se réglera dans l'assemblée légale.
40 Nous risquons, en effet, d'être accusés de sédition pour (ce qui s'est passé) aujourd'hui, puisqu'il n'existe aucun motif qui nous permette de rendre compte de cet attroupement. Cela dit, il congédia l'assemblée.

Le secrétaire de ville ne semblait finalement pas très soucieux du culte de l'Artémis des Éphésiens ni du profit matértiel qu'en tiraient Démétrius et les artisans ! Il instruisit consciencieusement la foule sur les diverses possibilités qu'il y avait de régler les différends en s'adressant à l'assemblée légale, notamment s'il y avait encore d'autres réclamations.

Le souci principal du secrétaire de la ville semblait plutôt être de ne pas se faire remarquer négativement par le pouvoir romain. Si le proconsul romain venait à apprendre l'émeute qui s'était produite, il ferait certainement des recherches sur la cause de cet attroupement et les autorités de la ville auraient des difficultés à le justifier. Le secrétaire de la ville fit donc tout son possible pour calmer la foule et pour renvoyer les gens chez eux.

Cet épisode est particulièrement intéressant car il nous apprend que la présence des autorités romaines assurait aux chrétiens la possibilité de se défendre légalement dans l'empire lorsqu'ils étaient accusés à tort. L'apôtre Paul en fit usage à certaines occasions et alla même jusqu'à faire appel à César !