Les éditeurs de la Traduction du Monde Nouveau se sont permis de "restituer" le Nom divin, qui apparaît dans l’AT sous la forme YHWH , en 237 endroits dans le NT et cela bien qu’aucun manuscrit ancien du NT ne le contienne. Ils affirment sur la base d’éléments de preuves indirects que les scribes du 2e ou 3e siècle ont remplacé le Nom divin dans le NT par Seigneur ou Dieu. Pour restituer le Nom, ils se basent sur les citations de l’AT où celui-ci figure et sur des versions hébraïques du NT dont la plus ancienne date du 14e siècle mais qui sont pour la plupart des copies de textes plus anciens.
Il n’est pas question ici d’entrer dans le débat complexe de la présence ou non du Nom divin dans les manuscrits originaux du NT. Signalons simplement que cette question dépasse le rôle du traducteur qui devrait cantonner toute déduction de ce type dans les notes*. Il s’agit juste de démontrer qu’on ne peut pas invoquer des citations de l’AT contenant le Nom divin pour systématiquement restituer celui-ci dans le NT. Ceci ne peut pas être une règle car comme nous allons le voir il existe des exceptions notoires.
En effet, on peut remarquer qu’ils n’ont pas restitué le Nom divin en 1 Pierre 2:3 qui est pourtant une citation du Psaume 34:8 le contenant. Pourquoi ? Parce que l’application de ce texte à Jésus qui est la pierre rejetée est évidente : "pourvu que vous ayez goûté que le Seigneur est bon. Venant vers lui comme vers une pierre vivante, rejetée, c’est vrai, par les hommes, mais choisie, précieuse, auprès de Dieu".
Si ce texte de l’AT mentionnant Yahweh est appliqué à Jésus que penser des autres** ? N’y a-t-il pas risque d’erreur en remplaçant Seigneur par Jéhovah pour un texte où l’application à Jésus n’est peut être pas aussi évidente mais pourtant bien réelle ?
C’est bien ce qui se passe avec Romains 10:9-13 : "Car si tu déclares publiquement cette ‘parole dans ta bouche même’, que Jésus est Seigneur, et si tu exerces la foi dans ton cœur que Dieu l’a relevé d’entre les morts, tu seras sauvé. (10) Car c’est avec le cœur qu’on exerce la foi pour la justice, mais c’est avec la bouche qu’on fait la déclaration publique pour le salut. (11) Car l’Écriture dit : ‘Quiconque met sa foi en lui ne sera pas déçu’. (12) Il n’y a pas en effet de distinction entre Juif et Grec, car il y a le même Seigneur au-dessus de tous, qui est riche pour tous ceux qui l’invoquent".
Au verset 11, Paul cite la seconde partie d’Esaïe 28:16 : "Voici que je pose comme fondement en Sion une pierre, une pierre éprouvée, l’angle précieux d’un fondement sûr. Celui qui exerce la foi ne sera pas pris d’affolement". Ce texte s’applique évidemment à Jésus qui est la pierre éprouvée. Au verset 12, les mots en effet (grec gar) relient ce qui va être dit à ce qui vient d’être formulé et le tous est le pendant du quiconque. Il est donc toujours question du Seigneur Jésus.
Paul continue : "Car ‘tout homme qui invoquera le nom de Jéhovah sera sauvé’". Comment les traducteurs ont-ils pu se permettre ici de remplacer Seigneur par Jéhovah ? En effet, la conjonction car (grec gar) relie ce texte à ce qui précède et indique la raison de ce qui vient d’être formulé. Il est donc évident que c’est toujours du Seigneur Jésus dont il est question. Paul parle par ailleurs de "tous ceux qui, partout, invoquent le nom de notre Seigneur, Jésus Christ" (1 Corinthiens 1:2, voir aussi Actes 9:21).
Ce phénomène consistant à appliquer des textes de l’AT mentionnant Yahweh à Jésus a une explication : le Père a donné les pleins pouvoirs au Fils. Celui-ci en effet "s’est abaissé devenant obéissant jusqu’à la mort sur une croix. C’est pourquoi Dieu l’a souverainement élevé et lui a conféré le nom qui est au-dessus de tout nom afin qu’au nom de Jésus tout genou fléchisse dans les cieux, sur la terre sous la terre et que toute langue proclame que le Seigneur c’est Jésus Christ à la gloire de Dieu le Père" (Philippiens 2:8-11, Bible de Jérusalem).
* Il est tout aussi illégitime pour un traducteur de remplacer le Nom divin dans l’AT par le titre Seigneur alors que le texte a YHWH.
** L’application à Jésus est évidente dans les textes suivants : 2 Th 1:9 qui cite Es 2:21 (Septante) et 1 Pi 3:14-15 qui cite Es 8:12-13.
Sauf mention contraire, les citations bibliques proviennent de la TMN.
Emmanuel